Il faut un certain courage pour
élever seule ses enfants, quand on choisit de se passer d’un homme au
quotidien. Il en faut encore plus quand on
SUBIT la chose alors que l’enfant n’a pas encore l’âge de l’autonomie. Quand le
mâle déserte, attiré par un autre chant de sirènes, il faut comprendre que le
bateau va prendre une mer agitée, pendant de longues années et cela, dès le
lendemain de la rupture.
Il faut un temps pour comprendre
cela : qu’une personne manquera pour accomplir toutes ces menues choses
qu’une maman effectue chaque jour, avec ses enfants. J’en cite quelques-unes,
parmi les plus réjouissantes : le matin : réveiller des enfants endormis,
les houspiller pour qu’ils s’habillent, déjeunent correctement, mettent leurs
chaussures et surtout leurs lacets, partir rapidement à l’école après avoir
fait le dernier pipi qui dure 15 plombes ; le soir vérifier les devoirs,
une fois rentrés, après avoir réussi à attraper le train de 17h58 en ayant
pesté auparavant contre tous ces gens égarés en gare du Nord, répéter
inlassablement « Ne passe pas trop de temps devant l’ordinateur ou la TV »,tout
en préparant un repas (purée jambon au choix, quiche, ou à la rigueur,
pâtes ?) avec 75 ou 80% de chance qu’ils ne voudront pas les trucs verts
qui grouillent dans l’assiette (« ce sont des haricots, mon chéri »),
les inciter à aller se doucher car « il est déjà 21h et demain tu
n’arriveras pas à te réveiller , ma fille (ou mon fils)» et se laver les dents - tâche qu’ils accompliront
en 58 secondes, voire 34.
J’en passe et des meilleurs. Bien
entendu, c’est selon l’âge, l’humeur du jour et le degré d’obscurité derrière
la fenêtre. La courte nuit de la mère (se délectant d’une série entre 22h et
03h du matin) sera aussi propice, ou non, à la cordialité ambiante. Une nuit
d’amour avec un amant de passage, n’en
parlons pas : cela ne fait en général pas partie du lot de ces 14.5%* de
femmes seules vivant avec un enfant (contre 2.9%* des hommes vivant la même
chose).
Les questions sous-jacentes à
cette longue entrée en matière sont celles-ci :
Quid de la
vie amoureuse, sexuelle de la plupart de ces femmes-là ?
Comment
réussissent-elles à retrouver un amant, un amoureux, un compagnon ? Par
quel intermédiaire ?
Pourquoi
restent-elles seules ? Combien de temps ?
En général, ces « femmes-là » se voient attribuer la garde suite à une
défaillance de « leurs hommes » : ils les ont trompées, se sont
barrées avec une autre, ou dans le pire des cas, sont morts. Quoique le sujet
traité ici est celui des femmes-mères, pas des veuves.
Un peu d’histoire,
peut-être ?
Il est amusant de taper sur
wikipédia le terme ‘ fille-mère’. On obtient quelques définitions, ou d’emblée
quelques citations qui nous hérissent le poil, à nous, femmes-mères du XXIe
siècle :
‘Mais, dans la pratique, celles
qu’on appelle des filles-mères sont chichement aidées, tenues en état de
mépris et, le plus souvent, jetées à la rue, précipitées aux abîmes. — (Ludovic Naudeau, La
France se regarde : Le problème de la natalité, Librairie
Hachette, Paris, 1931)’
Il faut regarder la traduction qui
s’inscrit telle quelle, dans le langage de notre moderne siècle, sur cette même
page wikipédia : « mères célibataires »…
Ah ! Le terme pourrait
revigorer, offrir une liberté que ne permettait pas ce terme
méprisant «fille-mère », auquel on associe aussitôt le pêché (du
XIXe), le côté « pauvre fille », la fille qui sort du rang, qui
devient de suite une fille honnie, mal aimée, et qui, parfois, tombera dans la
prostitution, la calomnie, la folie le crime ou la mort (cf. Tess of
Uberville de Thomas Hardy, Fanchon, la maman de Cosette dans les Misérables de
Hugo, pour ne citer que les plus tristement célèbres).
Non. Les temps ont changé, il
faut bien le reconnaître. Le terme est désormais synonyme d’une forme de
liberté.
La mère célibataire trempe
d’abord un doigt hésitant dans ce mélange étrange, puis la main, le bras et
parfois tout le corps. Elle n’est pas programmée pour cela. Elle a appris à
devenir mère. Elle a voulu (ou pas) cet enfant avec cet homme. Il l’a quittée.
Elle doit réapprendre à devenir femme. C’est un processus qui se déroule
presque toujours de la même manière. Au début, elle apprend à garder son enfant
24h sur 24, tous les jours, toutes les vacances, puis le père se souvient qu’il
a un gosse : il accepte de le garder un WE sur deux, puis parfois une
semaine sur deux, et la moitié des vacances. Ca, c’est le meilleur des cas,
quand le père est intelligent, voire quand il est rongé par la mauvaise
conscience. Parfois il n’apparaît plus du tout : il a refait sa vie, ne
veut plus entendre de la première. Et là, la mère en reste au stade un :
la garde à plein tube. L’aide des amis est vitale, dans ces moments-là.
Donc, au fur et à mesure que l’enfant gagne en
autonomie et la mère en temps, elle a envie de revenir à des choses auxquelles
son esprit s’était éloigné depuis de longs mois. Une fois, une mère célibataire
a avoué à un homme qu’elle était restée seule 7 ans avec ses enfants. Sans
avoir envie d’un homme. L’autre l’avait regardée sans comprendre. Forcément.
Quand la mère-célibataire
comprend qu’elle peut et qu’elle a le droit d’utiliser du temps pour elle, elle
y va. Parfois, trop franchement : l’enfant trinque, diront les plus
prudes, quand elle le confie trop souvent à la copine, la baby-sitter, la
voisine (plutôt qu’à sa propre mère, car la honte du XIXe siècle la taraude
encore et la pousse à se cacher du jugement des autres), pour sortir en
boîte le week-end, en « After »
après le boulot, ou à l’hôtel pour s’offrir quelques heures de plaisir avant de
reprendre le masque de la mère.
Car tel est le lot de certaines de
ces femmes-là. Elles ont encore envie de
plaire, de se donner du plaisir, et d’en donner. En dépit de toutes ces menues
tâches citées plus haut. En dépit du jugement qui ne manquera pas de
s’exprimer, hypocritement, ou avec une fausse compassion, sur leur comportement
‘ léger’. Elles sont au cœur de leur
sort, de leur destin, de leur solitude, mais dans la plus grande majorité des
cas - et ce serait faux de le nier, elles sont victimes de leur situation.
Elles ont eu à vivre la déception d’un homme qui les a trompées, les a laissées
seules avec des enfants sur les bras. La souffrance qui en découle (liée à la rupture physique : le corps
de cet homme n’est plus dans leurs bras à elles, mais dans ceux d’une autre),
la colère, l’incompréhension, le fatalisme, l’ego malmené (« il m’a
abandonnée » étant un sentiment inconcevable chez certaines femmes
convaincues de leur pouvoir de séduction), l’abattement. Puis viendra le temps
du sentiment inéluctable : continuer à tracer la route, pour les enfants,
quoi qu’il en coûte. Quoi qu’elles fassent.
Aussi, parler de légèreté pour
qualifier le comportement de ces femmes qui ont encore envie d’aimer, c’est
d’une totale indécence. Je ne parlerai pas ici de certaines qui font
effectivement n’importe quoi, qui laissent leurs enfants régulièrement seuls,
la nuit, pour aller baiser avec des mecs d’un soir - cela relève de l’irresponsabilité
totale. Je parle de celles qui se sentent encore autant femmes que mères et qui
ne comprennent pas pourquoi elles ne devraient être que la seconde, tant
vis-à-vis de leur enfant que de la société. De nombreux mâles examinent leur
situation sous un angle nonchalant, ronflant (comme lorsqu’on est assis dans un
bon fauteuil de cuir duquel on a du mal à s’extraire): « bah elles ont
déjà un gosse, elles ne vont pas continuer à nous faire chier, encore :
qu’elles s’occupent de leur môme, après tout ». Cela vaut autant pour les pères (qui se
débinent ainsi de bien des tâches), que pour les grand-pères (le père des mères célibataires) trop heureux
de retrouver leur fille, comme au bon vieux temps, avant qu’elles soient
mariées (ou en concubinage, ou pacsées), car, si elles ne sont pas trop
distantes, elles reviendront toujours vers eux…
La société dans son grand
ensemble (et en particulier les femmes seules sans enfant) pensent ouvertement
ainsi: « Ne te plains pas, tu as déjà un gosse, toi ! »
Mais…. Qui s’occupe de connaître
leurs états d’âme, le dimanche après-midi, quand elles sont vraiment seules
(sur ces fameux week-ends d’un sur deux), et qu’elles entendent les rires
d’enfants encadrés par ceux de leurs parents, quand elles se promènent le long
d’un canal (de l’Ourcq, de l’Oise…) après avoir peut-être goûté ‘aux joies
éphémères du 4h’ (certaines femmes nommant ainsi leurs trois ou quatre
conquêtes qu’elles voient, sur des villes différentes pour ne pas créer
d’incidents de parcours), avec ce mal de ventre qui surgit lorsqu’elles croisent
des couples d’amoureux de 30 ans avec des poussettes dans lesquelles se
vautrent de délicieux poupins ?
Qui s’occupe de leur solitude le
soir, quand les enfants dorment du sommeil du juste, après un dernier câlin,
après avoir respiré leur odeur de maman? Qui s’occupe d’elles quand il est
22h, quand le programme TV est nul, quand les séries ne font plus
fantasmer ? Qui s’occupe de leur corps qui réclame des caresses sous des
mains expertes (tant qu’à faire : elles deviennent exigeantes et même
coupantes en la matière) et des baisers dérivant vers des zones non
contrôlées ?
Qui les console quand elles
s’attachent à l’un de ces 4h et que le salaud les plante comme de vieilles
chaussettes ? Qui a encore envie d’elles quand elles s’aperçoivent que la
peau de leur cou commence à se flétrir ?
Eh bien, pour ces femmes-là,
aussi, une solution existe. Car oui ; les hommes de marketing ont la
science infuse, c’est bien connu. Ils leur ont concocté de super sites pour
femmes exigeantes : meetic, tinder, millionnaire.com. Pour ‘adopte un mec.com’, c’est une femme qui
l’a inventée. Et oui, on ne peut pas tout maîtriser, messieurs. Il faut bien en
laisser pour les plus nymphomanes.
Alors par milliers, elles
s’inscrivent, elles trinquent dans des bars, s’apprêtent afin de paraître
encore belles et jeunes. Elles sortent grâce à des soirées ovs (on va
sortir.com) où elles font des choses qu’elles n’auraient jamais fait auparavant
(je parle de sport comme l’escalade, le deltaplane etc… : ah je vous ai
bien eus…). Elles rencontrent des ‘gens sympa ‘ le temps d’une soirée théâtre, d’un
cinéma, d’une danse.
Tout cela a un coût, au
fait ! On allait passer outre. Taratata, comme dirait l’autre. Ce n’est
pas gratis. A ovs, par exemple, vous avez droit à un mois gratuit de sorties
pour vous amuser comme des petites folles, et puis si vous voulez retrouver le
super mec que vous avez croisé à la sortie n°42157, il faudra payer
l’équivalent de 25€. Enfin, quelque chose comme ça. Tout a un prix, dans la
vie : même la mise en relation. Même le début d’une amitié. Voire qui
sait, d’un amour. Car si si, ça existe : certains se dégotent un mari dans
cette histoire. Et puis c’est tellement has been de ne pas en être (sur meetic,
je veux dire). C’est d’un autre temps que de croire que l’on rencontrera encore
l’homme de sa vie au détour d’une rue, d’une soirée entre amis. Tout doit être
prêt à être consommé, ou remboursé. C’est bien connu.
Les femmes ‘mères-célibataires’
ont le choix entre toutes ces vies. Certaines réussissent la bascule : retrouver
un équilibre avec un autre homme ayant des enfants, re-devenir heureuses, sans
trop de heurts avec l’ancien (homme). Parfois elles ont la malchance de
retomber sur de solides goujats (on devrait inventer un nouveau site:
« aux abonnésdesalauds.com »), et alors là, elles laissent
complètement tomber les mâles, deviennent lesbiennes, ou se consacrent à leurs
canaris. A leurs enfants, bien entendu (cela allait de soi, enfin !).
Elles ont des passions autre : la lecture, les voyages, le travail, par défaut. Elles découvrent le vrai sens du mot
« entraide ». Elles deviennent membres d’associations caritatives. Se
font bonnes sœurs. Enfin, ça, c’est à discuter…
Elles écoutent de la musique
jusque pas d’heures, mangent des gâteaux au chocolat même s’il est 23h30. Elles
ne supportent plus l’idée de devoir aller chercher des chaussettes sales
d’hommes sous le lit. Elles tapissent la cuisine, réparent les éviers bouchés
et se curent le nez, le soir, en regardant la TV. Ca, c’est peut-être possible
de le faire, aussi, après 15 ans de mariage. Enfin. Bon. Elles s’occupent du
mieux possible pour ne plus avoir à penser aux hommes qui les faisaient rire,
jouir, pleurer (de bonheur, ça arrive aussi). Ces hommes qui les ont un jour
aimé d’un amour vrai (le temps de quelques mois, ou de quelques années, avant
de les abandonner car l’herbe est plus verte ailleurs, et parce qu’elles se
négligeaient trop en prenant trop au sérieux leur rôle de maman).
Car, après tout, il faut dire les
choses. Les femmes -célibataires sont souvent des ‘victimes’. Mais, aussi,
parfois de vraies chieuses, de vrais dragons, de vraies soupes-au-lait. Elles
sont devenues ainsi parce qu’elles devaient le devenir. Rien n’est blanc ou
noir. Tout est à construire, à reconstruire, quand tout a été dit.
La société construit de drôles d’individus.
Des femmes -maîtresses, des femmes maman célibataires qui
croisent leurs homologues mâles auxquelles elles ressemblent parfois de
plus en plus, dans leur comportement. Elles les ont croisées, avant, pour
s’accoupler et faire des bébés (leur programmation est ainsi faite). Puis un
jour, l’homme (ou la femme) a regardé l’autre dans le blanc des yeux et a
décrété « On ne s’aime plus ». Dès lors, ils n’ont plus fait que
s’observer, à la dérobée. Pour se critiquer. Pour relever les défauts
réciproques. Pour parfois baiser car il faut bien.
Dans cet amas de cœurs labourés,
de corps oubliés, où se cache l’Amour ?
S’il est exhibé dans ses étapes (rencontre-dîner, effets de séduction
sponsorisés par morningkiss.com,
consommation ou pas le premier soir) grâce à ces fameuses ‘dates’
organisées par les sites marketing, où
se trouve l’étincelle ? Cet acte fondateur qui lie un homme et une femme?
Celui qui naît d’une spontanéité, d’une rencontre fortuite et non
programmée ?
Certaines croient encore à
l’Amour véritable. Celles-là prennent leur temps. Se disent qu’il leur tombera
dessus. Comme les étoiles des poèmes.
A chacune sa voie. Si les
femmes-célibataires attendent tout de l’homme, elles seront déçues. Si elles
savent être en harmonie avec leurs désirs du moment, peut-être réussiront-elles
à ne plus se sentir hors des sentiers balisés (ceux qu’empruntent encore 48%*
des hommes et des femmes en couple). Du moins se sentiront-elles plus légères…
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