Nouvelles (Extraits)
Rouge
Les coccinelles à pois noirs sont rouges. C’est pourquoi elles sont adulées, copiées sans jamais pouvoir être imitées dans leur infinie beauté.
Leur rouge est fragile, tendre, sec. Il peut s’effriter d’un seul coup de pouce.
Avez-vous déjà admiré de près les petites coccinelles de nos chambres d’enfant ? Celles qui sont minuscules, qui véhiculent la nostalgie, s’il y en a une, de notre enfance ?
Avez-vous jamais eu la moindre empathie pour ces bestioles dont la sœur venue d’Asie, s’est fait friande ? Car si vous ne le saviez pas encore, je vous le dis maintenant… La coccinelle d’Occident a disparu ; elle s’est fait bouffer par l’autre. N’allez pas chercher une métaphore de notre société. Non, non. Ce serait trop simple.
Je vous décris la coccinelle d’Asie. Elle est plus grosse que la nôtre. Mais ce n’est pas tant leur grosseur de noix qui bouleverse, mais leur puanteur. Sous le pouce, elle est insupportable. Comme si, en survolant les continents, elle avait charrié tous les remugles de la Terre pour les concentrer sous ses ailes.
C’est clair, vous le sentez : je hais les coccinelles d’Asie. Je me demande bien pourquoi elles sont venues dévorer nos amies. Comment ont-elles pu les sentir ? Chacune avait sa place… Faut croire que non. Celles d’Asie n’en avaient pas assez. Il leur a fallu supplanter nos innocentes, nos inoffensives, nos mignonnes compagnes. Pour quoi, au final ? Etres exterminées par nos pouces vengeurs. Rien n’est si simple.
Tout combat fratricide a ses revers, ses trahisons, ses coups de pouce, ses échappatoires, ses lâchetés. Dans ce fatras de querelles intestines, je me dois de présenter Rosine, celle qui incarne ce combat.
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Les bleus de Jef
Jef est un gamin qui rêve. Paris est sa maison, le quai Branly son quartier.
ll a huit ans, un chien Tomie et deux copains. Il a une particularité de taille, Jef : il a des petits pieds. Il a une envie : devenir danseur-étoile. Il n’aime qu’une seule couleur : le bleu. Il pourrait l’aimer comme d’autres aiment les poissons rouges. Mais non, il l’aime plus encore. Il l’aime parce qu’elle est devenue le support de ses rêves, son amie.
Parfois, il remonte les avenues jusqu’à la grande rue de Rennes. Sa maman lui a dit que là-bas, il y a du beau monde, et beaucoup de bruit. Alors forcément, il doit y avoir du bleu. En général, il demande à Tomie de l’accompagner, pour être un peu moins seul.
Et il en trouve partout ! Dans les affiches de publicité, les panneaux de signalisation, les enseignes de magasin, les plaques de rues. Jef a l’impression que ces bleus l’envoûtent, emplissent sa vue, jusqu’à la noyer, comme lorsqu’il va à la mer et qu’il est dans l’infinité de l’eau.
Très vite, pourtant, il s’est rendu compte que le spectacle des bleus est le plus impressionnant lorsque la nuit commence à tomber. Entre chien et loup, comme le lui a apprit sa maîtresse, la magie opère. La rue devient un immense reflet bleu, un océan où il peut plonger avec délice. Mais les bleus finissent par se ressembler. Alors Jef a inventé un truc. C’est sûr, il doit être le seul à y avoir pensé : il les affabule des mots qui sont écrits dessus en gros caractères : Bleu Lulu Castagnette, Bleu Henry Philippe, Bleu Virbel, Bleu Argus.
Justement, un soir, après la classe, Jef a envie de la revoir, cette guirlande. Il a emmené Tomie avec lui pour faire plus crédible.
Elle est là : elle l’attend avec ses mille petites loupiotes bleues suspendues entre les deux mâts. Le fil retombe de chaque côté, comme un rideau de soie. C’est plus beau qu’au cirque Grüss, où il est allé voir des chevaux faire des numéros d’acrobatie.
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Roman
Abbad et Marian
Extraits
Deux ans plus tôt, à deux mille cinq cent lieues de là, une petite Marian avait ensoleillé le cœur de ses parents en naissant dans la brièveté de ce temps que les anciens appellent « Entre chien et loup »...
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La vie de Marian se transforme en profondeur. Les soubresauts, qu’elle essaie de maîtriser, deviennent de plus en plus fréquents. Un volcan gronde en elle. Il s’empare du moindre souvenir pour éclater en pluies de feu sur son cœur.
Le tempo de la passion s’est incrusté en elle. Sa volonté première d’oublier Abbad s’est rétréci comme une peau de chagrin. La jeune femme s’est aliénée au souvenir comme le bébé au sein de sa mère...
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« Et dire que ces gens adorent un Dieu autre que les nôtres ! Ils seraient prêts à tout pour le satisfaire. Et ce jeune homme ! De quel sang est-il ? Il me dévisage, là, avec ses yeux marron et son teint bigarré. Que peut-il bien penser de moi ? Moi, je sais déjà ce que je pense de lui. Il ne fait pas partie des nôtres. Marian dit aimer cet homme. Qu’a-t-il de plus que Galaad ? Il est maigre à faire peur… Je suis sûr qu’il ne sait pas monter à cheval, ni manier un arc… Et ses mains… longues et fines. Pas habituées à travailler la terre… Bon signe ? A voir. Ses yeux et son front semblent toutefois porter une certaine noblesse. A creuser. Mais, mais…, que se passe-t-il ? » ....
3 commentaires:
Petits mots d'éditeurs relatfis à "Abbad et Marian":
ALBIN MICHEL
HACHETTE
HACHETTE: Nous avons lu avec attention et sympathie votre manuscrit.. Nous avons apprécié votre style original et prometteur. ....
POCKET JEUNESSE
Il s'agit d'un roman singulier, très émouvant. Votre manuscrit ne peut laisser indifférent, et nous avons été sensibles à sa poésie.
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EDILIVRES
A retenu le roman.
Le comité de lecture souhaite éditer Abbad et Marian...
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