dimanche 12 avril 2015

Les amours de métro



Je l'ai vu, ton sourire aussi beau que le jour. L'heure de ce sourire est l'heure de l'amour. 
Alfred de Vigny

Il est 8h20 du matin, près de la station Front Populaire, en ce 24 février 2015. Je me suis assise sur un strapontin, près d'un couple chinois, d'une quarantaine d'années. Il y a beaucoup de Chinois dans ce nouveau quartier d'Aubervilliers. 
La femme a posé ses jambes sur celles de l'homme. Elle porte un fuseau noir, des baskets noires. L'homme porte un parka noir, des baskets comme celles de la femme (mais de couleur marron clair: c'est la seule chose qui les différencie). 
Il lui caresse les jambes d'un air qui reflète l'amour de la nuit. 

La femme a les yeux dans le vague. Les paupières lourdes d'un sommeil qui n'a pas voulu d'elle. L'amour est passé par là.
La sensualité de leurs êtres est comme un refus du temps. Chaque seconde est une éternité. L'amour vit, éclate. On le sent comme chaque particule d'air respirée. Leur moindre mouvement s'effectue avec une lenteur que l'on soupçonne teintée de regret. Ils sont si bien l'un contre l'autre. En les regardant, on a envie de se plonger dans un corps-à-corps avec un homme. De se donner par-delà notre âme.

Quand le métro s'arrête, je les regarde. Dans leurs yeux, brille cette flamme que j'aime tant. Leurs bouches sont pleines de l'amour de l'autre. Je leur montre du doigt le poème accroché au-dessus d'eux. Je les désigne en disant " vous " et en repointant du doigt les lignes de Vigny. Par-delà la langue qu'ils ne comprennent sans doute pas, je pense qu'ils saisissent le sens de mon geste car ils se dévisagent en souriant.  Je ne dis rien de plus. Ce serait inutile. 
Je sors de la rame du métro, prends l'escalator et me retourne une dernière fois sur eux. Ils me regardent en se tenant la main. Très fort, me semble-t-il. Ils me sourient. 
Une rime de poème s'est incarnée, ce matin.



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Heure de pointe, 19h. Hiver 2013. Les rames de métro sont pleines à craquer. 
Dans cette foule en quête d'espace, un petit couple de chinois, d'une vingtaine d'années.
Il se sont assis sur des strapontins. Collés l'un contre l'autre. Sans gêne. Peu importe s'ils prennent un espace qui n'est pas le leur. Personne ne leur adresse le moindre reproche. A vrai dire, ils semblent dormir. La jeune femme a la tête posée contre l'épaule de son compagnon. La bouche en cœur, dévoilant une innocence magnifique dans un moment de laisser-aller. Elle dort, bercée par le métro, rassurée par la présence de son amoureux. Malgré ses yeux fermés, il a un air dur, pour qui oserait s'approcher trop près d'elle.
Ils sont punks. Les cheveux du jeune homme sont vert fluo, ceux de la fille rose. Leurs vêtements tapageurs collent à leur look de jeunes rebelles insouciants.
Ils dorment du sommeil du juste. Quand je quitte la rame, ils dorment toujours. Personne ne les a dérangés. 




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